A l'extrémité sud-ouest de la Bretagne, la baie d'Audierne forme un immense arc de cercle qui s’étire de la pointe du Raz au nord, à la pointe de Penmarc'h au sud. Les paysages y offrent un échantillon de presque toutes les formes littorales possibles : falaises, dunes, galets, plages, paluds ... Au cours des millénaires, les fréquentes fluctuations du niveau des mers, ont affecté et modelé les rivages de cette côte. Les eaux terrestres quant à elles, en s'accumulant derrière les barrages de dunes, y ont créé des zones marécageuses.
Pour comprendre la morphologie de ces lieux, il est nécessaire de faire un retour en arrière de quelques milliers d'années.
Avant la dernière glaciation, la mer se trouvait 10 à 15 mètres au-dessus de son niveau actuel. Ce niveau a fortement marqué les rivages en y laissant son empreinte. Elle s'est ensuite retirée durant la glaciation, puis le réchauffement climatique la fit revenir 3 mètres plus haut qu'actuellement avant qu'un léger retrait ne construise les rivages que nous connaissons.
L'aspect du rivage varie donc selon que la mer ait ou non retrouvé son lit d'origine (niveau normalien ou monastirien). Dans la baie d'Audierne, les deux cas se présentent : au Nord, la ligne de rivage correspond bien au niveau normalien contrairement au Sud, où les falaises mortes se situent plus à l'est, dans les terres.
De la pointe du Raz jusqu'à l'anse du Loc’h, de très hautes falaises correspondent aux rivages d'origine. Le trait de côte n'évolue que très peu. A partir du Loc'h et jusqu'à Plozévet, les falaises s'abaissent brutalement ou progressivement en laissant place à des dépôts sableux. A partir de Pors-Poulhan, la côte prend le nom d'Avi Vili ou côte de galets. La mer n'a pas rejoint l'ancien rivage et la plateforme, jusqu'aux falaises mortes, commence à s'élargir vers le sud. Une petite falaise de moins de 5 mètres subsiste jusqu'à Penhors. C'est là que commence l'Ero Vili ou sillon de galets qui s'étend sur 10 kms, jusqu'à Tronoën.
Avant la guerre, le sommet de ce cordon de galets, de graviers et de sable avoisinait la cote +8,00m et sa largeur atteignait, voire dépassait 50m. Les vagues des tempêtes font progresser l'Ero Vili vers les terres et le recul de la côte s'accélère si l'on diminue la masse du cordon. Entre l'Ero Vili et les falaises mortes de l'ancien rivage s'étendent les paluds. Ces terres basses sont recouvertes de sable formant au sud, des dunes de 3 à 4 mètres. Barrés par les dunes ou l'Ero Vili, les ruisseaux y ont formé des étangs. La fragilité de ce secteur était connue et déjà, un arrêté préfectoral de mars 1934 interdisait toute extraction côtière sur le territoire de la commune de Plovan.
Ces conditions particulières font de la baie d'Audierne un milieu naturel particulièrement préservé car l'homme n'a jamais réussi à s'y implanter et à y développer des activités pérennes. En effet, ces terres pauvres, desséchées en été et gorgées d'eau en hiver, n'ont pas permis d'expansion agricole. Sur les étendues situées entre le cordon dunaire et l'ancien rivage du quaternaire, ni la culture, ni l'élevage, n'ont connu d'ampleur. L'activité industrielle s'est limitée à l'exploitation de petites carrières et, dans des conditions particulières, à celle des gisements de galets.
Quant au tourisme, si l'existence de 10 kms de plage de sable fin semblait au départ un atout, les conditions climatiques ambiantes ont très vite contrarié toute tentative de son développement : une mer dangereuse, une forte houle, un vent quasi-permanent ont rendu le secteur inexploitable.
Pour en savoir plus : Le site du conservatoire du littoral, faune flore gestion et guide pratique
Le dossier écologique de la Baie d'Audierne
En 1976, dans le cadre de son programme nucléaire, Electricité de France avait confié au CNEXO, le Centre National pour l'Exploitation des Océans l'instruction des dossiers écologiques concernant une liste de sites littoraux envisagés pour l'implantation de centrales. Celui de St Vio à Tréguennec en faisant partie. lLétude y décrivait le contexte écologique et mets en évidence le recul inexorable affectant le trait de côte, mais aussi l'intérêt peu favorable du site pour une implantation d'une centrale.
L'objectif de ces dossiers dits "d'avant-projet" est de rassembler des éléments de comparaison entre les sites. Le présent rapport concerne le site de ST VIO-TREGUENNEC qui est situé en Bretagne méridionale, plus précisément dans le pays bigouden. Pour constituer ce dossier écologique, il a été prévu d'effectuer des études de terrain portant sur les populations algales et animales vivant sur le fond en séparant l'estran (zone comprise entre les hautes mers et les basses-mers) du benthos subtidal (niveaux toujours immergés).
Ces études sur le terrain devaient être complétées par une synthèse des données bibliographiques disponibles sur la région...
Pour en savoir plus : Etude écologique. Format PDF
Mais comment naissent les galets ?
Les galets que l’on retrouve actuellement sur les rivages de Bretagne sont, pour l’essentiel, le produit d’une préparation préalable des roches cohérentes sous un climat périglaciaire. En ce sens, il s’agit donc d’un matériel hérité dont la répartition inégale le long des côtes bretonnes s’explique par une action différenciée des processus d’attaque de la roche, au cours des phases froides du Quaternaire.
Les accumulations de galets se répartissent actuellement de façon très inégale le long des rivages de Bretagne. Quatre secteurs côtiers concentrent l’essentiel des stocks de matériel grossier à l’échelle régionale :
Le premier secteur s’étend de la baie de Saint-Brieuc à la baie de Morlaix, sur la façade septentrionale de Bretagne, et correspond grossièrement à la côte du Trégor. Cette section littorale a notamment été étudiée par J.-P. Pinot (1961, 1963). L’auteur y livre une description détaillée des nombreux cordons de galets et queues de comètes qui se répartissent entre la rivière de Lannion et la rade de Paimpol. Plus récemment (1997), Morel y a recensé 33 accumulations majeures de galets, parmi lesquelles on compte les flèches du Linkin et du Sillon de Talbert.
Le second secteur littoral riche en galets correspond à la rade de Brest, sur la façade occidentale de Bretagne (figure 18). Dans cet espace aux dimensions réduites, Guilcher et al. (1957) dénombrent une quarantaine de cordons littoraux et qualifient cet ensemble comme étant « …le plus intéressant de toute la côte française de la Manche et de l’Atlantique, après celui de la côte picarde… » en raison de la grande diversité des formes rencontrées. Outre ces formes d’accumulation majeures, toutes les plages adossées aux falaises sont également constituées d’un sédiment grossier, exception faite des plages artificielles, dont les sables proviennent du dragage des fonds sous-marins au large du goulet de Brest (Hallégouët et Guilcher, 1990).
Le troisième secteur caractérisé par la prédominance des galets s’étend de la pointe de Penhors à celle de Porz-Carn, en baie d’Audierne dans le sud du Finistère. Cette portion de côte est occupée par le cordon de l’Ero Vili qui s’allonge sur une distance d’environ 10 km (Guilcher, 1948). Toutefois, il convient de noter que les prélèvements sédimentaires effectués entre les années 1940 et les années 1970 ont réduit de façon considérable le volume de matériel grossier en présence sur ce littoral (Guilcher et al., 1990, 1992)...
- Extrait de la thèse de doctorat de Pierre Stéphan, Les flèches de galets en Bretagne : Morphodynamiques passée, présente et prévisible.
- Petit précis de vulgarisation à l'usage du néophyte dunaire
- Une vision générale de la baie avec la très belle vidéo Youtube de Christophe Cousin