Sur le littoral de la baie d'Audierne, une pelle à chenille de marque allemande chargeait les galets de l'éro-vili dans les wagonnets à destination du concasseur de Tréguennec. A Kiel en Allemagne, il existe encore un exemplaire de ce même engin, probablement le seul encore en état de marche. Cette vénérable Weserhütte LR4 de 1936 a voyagé jusqu'à Stalingrad durant la seconde guerre mondiale, puis déblayé les ruines de Kiel après-guerre avant d'être récupéré in-extrémis et patiemment restauré par l'ingénieur allemand Martin Kruse...
La pelle LR 4 a été fabriquée par Eisenwerk Weserhütte AG à partir de 1930. Il représente la dernière étape de développement de la série LR, dont les premières versions ont été produites en 1904. Au total et jusqu’à l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale, l'entreprise a fourni environ 1 500 excavatrices sur chenilles de différentes catégories à des clients allemands et étrangers.
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| Ci-dessous de gauche à droite, photo 1 et 2 : la LR4 au travail. Photo 3 et 4 : l'état de la pelle lorsque Martin Kruse en fait l'acquisition. | |||
La LR 4 était considérée comme une pelle universelle compacte, avec une capacité de godet de 0,4 m3. La superstructure avec cabine, moteur et treuils a des dimensions de 3,50 x 2,60 x 3,26 mètres. En fonction des accessoires fournis, la machine peut être utilisée de manière flexible en tant que benne preneuse, bulldozer, excavatrice de tranchée et de dragueline, ainsi qu'en version grue ou de marteau-pilon. Dans la version actuelle en tant que pelle hydraulique à godets, la flèche réglable de 5,50 mètres de longueur permet des hauteurs de travail allant jusqu'à 6,50 mètres et une portée allant jusqu'à 7,90 mètres. Le poids utile est de 20,5 tonnes. Cette pelle à chenilles est alimenté, depuis les années 50, par un moteur diesel MWM RHS 518 à trois cylindres de 60 ch. À l'origine, le modèle RHS 418, prédécesseur à quatre cylindres, était doté d'une puissance de 45 ch. En raison de sa vitesse de seulement 1,7 km/h, la pelle était généralement transportée par le rail, la largeur de la voie de chenille ayant été adaptée à ce type de chargement.
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| Détails des différents éléments de la Weserhutte LR4 totalement rénovée | |||
La LR 4 de Martin Kruze porte le numéro de série 1136. Elle a été acquise en 1936 par l'entreprise de construction Walter Kaiser à Rastenburg, en Prusse orientale pour être utilisée dans la construction de routes et le génie civil. Dès le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, la société et ses quelque 1 500 employés ont été placés sous l'autorité de l'organisation Todt. Dans le cadre de la campagne de Russie, la LR 4 était utilisée à l'entretien des voies d'approvisionnement allemandes. En 1942, elle était en fonction en URSS près de Stalingrad.
Endommagée par des attaques en URSS, la pelle est ramenée en Allemagne pour réparation. Et tandis que les usines Weserhütte sont gravement endommagées lors d'un raid aérien en 1945, la LR 4 survit aux bombardement. Dès la fin de la guerre, l'excavatrice participe au déblaiement la ville de Kiel puis elle est utilisé à la reconstruction de routes et de génie civil dans le nord du pays. Son activité prend fin dans les années 1960, date à laquelle elle est remisée dans la cour de l'entreprise à Preetz. Cela aurait pu être la fin de l'histoire si l'engin n'avait pas attiré l'attention de l'ingénieur en mécanique Martin Kruse.
L'atelier de Martin Kruse est situé dans le petit village de Schinkel entre Kiel et Rendsburg, où l'ingénieur y héberge bon nombre de machines-outils anciennes, de véhicules utilitaires et d’outils du siècle dernier. Avec quelques discussions et contre paiement, la pelle LR4 est finalement devenue ma propriété ", explique Martin Kruse. La pelle à chenilles a été entièrement désossée. De nombreux pièces étaient si abimées qu'elles n'étaient même plus reconnaissables. "De nombreuses pièces ont dû être fabriquées à partir de dessins et de photos anciens, précise Martin Kruze. Par exemple, j'ai entièrement reconstruit les paliers, bagues et boulons de l'excavatrice avec mes machines-outils. Des entreprises de la région m'ont également apporté un soutien occasionnel". La pelle sur chenilles LR 4 du constructeur Weserhütte est probablement aujourd'hui la plus ancienne, et certainement la plus parfaitement restaurée.
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| La pelle Weserhütte entièrement rénovée (photos Martin Schmolz) | |||
L'atelier de machines a été fondé par Martin Kruse en 1989 sur le site de l'ancien entrepôt Raiffeisen à Schinkel dans le Schleswig-Holstein, entre Kiel et Rendsburg. Outre la Weserhütte LR 4 de 1936, un tracteur Hanomag L 28 de 1963 avec semi-remorque Gaubschat, un pont roulant Harburger de deuxième génération avec le fabricant d’entraînements électriques Gebr. Burgdorf datant de 1910 environ et un moteur diesel DWK 6 M 24 construit dans les années 1930, Martin Kruse possède également de nombreux objets plus petits et des machines dont la restauration est encore en cours.
Avec beaucoup de persuasion et peu d’argent, de nombreuses machines-outils historiques ont également été rassemblées, parfois même sauvées à la dernière minute. ces machines outils sont utilisés aujourd'hui pour la restauration de véhicules mais aussi dans les activités quotidiennes de l'atelier d'usinage. Parmi les bijoux mécaniques de qualité, citons une perceuse horizontale des années 1930 ou une presse excentrique pour la construction navale, construite par le chantier Lauenburg Hitzler au début du XXe siècle.
Spécialiste de la réparation des véhicules utilitaires des anciens constructeurs Hanomag et Weserhütte ainsi que des moteurs diesel des marques Deutz / MWM et DWK / MaK, l'atelier de Martin Kruse jouit d'une excellente réputation. Il n’est donc pas surprenant qu’en plus des entreprises de la région, des exploitants de véhicules, des collectionneurs, des transporteurs et même des musées fasse appel à lui. Au musée de Kieler Stadt-und Maritime par exemple, différentes expositions ont été réalisées et plusieurs moteurs anciens ont été restaurés par ses soins. Pour le canal de Rendsburger, ce sont les éléments du système de verrouillage de l'écluse de l'ancien canal qui ont été remis en état.
Pour en savoir plus :
Le site web de Martin Kruse
