Grâce aux cahiers de régie du chantier de Tréguennec, qui sont un peu l’historique du camp, il est ainsi possible de suivre jour après jour, mois après mois, ce qu’il s’y passait d’ordinaire, mais aussi d’extraordinaire : La remise en état du camp, les tempêtes qui rendent le sable trop collant parce que trop mouillé, les pannes très fréquentes, les stocks qui ne partent pas faute de moyens de transport, les découvertes d’obus dans les concasseurs, les volumes traités, les coupures de courants et enfin la guerre qui ne finit pas de finir, et qui traîne derrière elle des années et des années de privation. Ces carnets ne mentionnent pas les évènements de la période de l'occupation, mais à l’aide de ces indications prises avec soin et datées avec précision, de recoupements, d’annotions en marge et de plans, il est possible de se faire une idée du fonctionnement de cette "usine à galets" à partir de sa reprise en main par le service de la reconstruction, jusqu’à sa fermeture.
Janvier 1946. Pourquoi si tard ?
Les Allemands ont quitté le site depuis le mois d’août 1944, soit 17 mois plus tôt. Brest a été libéré fin septembre 44, mais Lorient n’est tombé qu’en mai 1945. Le pays est exsangue, il n’y a plus rien : plus beaucoup de voies ferrées en état, plus de route et de toute manière plus de véhicules ni d’essence, la guerre vient de se terminer à Lorient il y a seulement sept mois et la ville de Brest est rasée
Remettre l’usine en route ?
A la sortie de la guerre, il faut tout reconstruire et les besoins en matières premières sont immenses. Le pays commence donc à recenser ce qu’il reste d’utilisable sur le territoire, afin de commencer "la reconstruction" et justement, à Tréguennec, il reste le fantôme de l’usine à galets, abandonnée depuis 17 mois, sabotée au départ des Allemands, pillée localement et, juste à côté des concasseurs, ces immenses tas de galets non utilisés en provenance de la côte. La logique est simple : Avec des galets et des concasseurs on peut faire de la pierre cassée et avec de la pierre cassée on peut reconstruire des ponts, boucher les trous, refaire des routes, remettre en état des voies ferrées etc. Brest et Lorient ne sont pas loin, ces secteurs ont énormément souffert des bombardements. Mais localement déjà, les besoins sont immenses.
Quelle réutilisation ?
Les étapes sont les suivantes :
- Remise en état du site
- Mise en régie et utilisation des galets en tas jusqu’à épuisement du stock
- Fermeture et vente par les Domaines
Notes
[1] Les cahiers de régie sont tenus par les Pont et Chaussées. Du format d’un cahier d’écolier, il recensent soigneusement et par colonnes, les travaux exécutés, les dates, le personnel présent, les incidents et les observations. Le premier de ces cahiers est ouvert le 22 janvier 1945.
[2] Durant un siège de Brest qui dura 45 jours (du 7 août au 18 septembre, la ville reçu 30 000 bombes et 100 000 obus. 10 000 militaires y laissèrent leur vie. A l’issue de la guerre, sur les 16 500 immeubles que comptait initialement la ville, 7 000 furent totalement détruits. En 1944, seuls 200 immeubles étaient encore debout, dont 4 dans le centre-ville. (source : FInistereHebdo)